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Pourquoi les écureuils d’Ottawa sont-ils noirs ?

L’écrivain Daniel Poliquin s’amuse à imaginer que les écureuils noirs d’Ottawa sont en réalité d’anciens rats menacés de disparition ! Dans la nouvelle « Pourquoi les écureuils d’Ottawa sont noirs ? », une colonie de rats se rencontre au parc Strathcona, dans le quartier Côte-de-Sable, pour discuter des meilleurs moyens d’assurer sa survie. Ses membres conviennent alors de se transformer en écureuils, car cette espèce est beaucoup plus appréciée des humains. Wilfrid, le chef des rats, résume ainsi le choix qui s’impose à eux : « Mourir rat ou vivre écureuil. Voir notre tribu, nos enfants, s’éteindre sans lendemain. Ou alors, prendre les devants : se réincarner tout de suite, se réinventer en une nouvelle race, pour assurer à chacun, ainsi qu’il le mérite, le salut individuel1».

Cette histoire est centrale dans l’œuvre de Poliquin. D’abord parue dans la revue L’Apropos en 1984, la nouvelle est ensuite reprise dans Le Canon des Gobelins (1995). Elle a aussi donné son nom au roman L’écureuil noir (1994). Jude, le personnage principal de La Côte de Sable (paru originellement en 1990 sous le titre Visions de Jude), la reprend à son tour, s’amusant à la raconter à son entourage. Ce jeu de clin d’œil entre les œuvres de Poliquin est emblématique de sa plume. Ses personnages reviennent souvent d’un livre à l’autre comme s’ils faisaient tous partie d’un même univers.  

Si la légende peut être lue comme une métaphore de l’assimilation des Franco-Ontariens, elle est devenue, dans l’œuvre de Poliquin, un symbole d’autodétermination : elle montre que chaque individu peut choisir sa propre identité et la modeler comme bon lui semble. L’identité vue par Daniel Poliquin n’est jamais fixe; il existe plusieurs façons d’appartenir à la communauté franco-ontarienne, et c’est à chacun de choisir l’option qui lui convient.

 

1 Daniel Poliquin, Le Canon des Gobelins, Ottawa, Éditions du Nordir, 1995, p. 65.