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Maires francophones d’Ottawa

Peu de francophones ont occupé le fauteuil de maire à Ottawa. Entre 1857 et 2017, on ne compte que huit noms à consonance francophone sur la cinquantaine de personnes qui ont siégé à la mairie.

Joseph-Balsora Turgeon est le premier d’entre eux. Il est maire de Bytown en 1853-1854. Il faudra ensuite attendre près de vingt ans avant qu’un autre commerçant influent de la Basse-Ville, Eugène Martineau, siège comme maire en 1872 et en 1873, après avoir été échevin pendant 16 ans. Celui-ci sera en faveur de la construction d’un aqueduc pour assurer l’approvisionnement en eau de la ville.

En 1882, c’est au tour de Pierre Saint-Jean de faire son entrée à l’hôtel de ville. Il y sera élu au suffrage universel, après avoir siégé comme député à la Chambre des communes de 1873 à 1878.  On ne sait pas s’il est né à Ottawa, mais il aurait fait des études à l’école privée ouverte en 1838, rue Sussex, par madame Zoé Masson. Selon Georgette Lamoureux, à qui l’on doit une riche chronologie des événements marquants de l’histoire de la population canadienne-française d’Ottawa, le docteur Saint-Jean est mêlé à tous les mouvements patriotiques et culturels d’Ottawa.

Une décennie plus tard, en 1892, Olivier Durocher devient à son tour maire d’Ottawa. Cordonnier et marchand, Durocher a été président général de l’Union Saint-Joseph d’Ottawa de 1895 à 1906, puis de 1912 à 1917.  Le docteur F.-X. Valade avait fait cabale pour occuper le poste quelques années plus tôt, mais avait été battu.

Un autre Canadien français, le pharmacien Thomas Payment, dirige Ottawa de 1899 à 1901. Il est maire quand le grand feu se propage aux plaines LeBreton et qu’il faut appeler les pompiers de Toronto, de Montréal et d’autres villes en renfort. Les débats entourant sa candidature montrent que la tension entre la Basse-Ville et la Haute-Ville, entre réformistes et conservateurs ainsi qu’entre francophones et anglophones est toujours aussi vive dans la capitale au tournant du xxe siècle.

Napoléon Champagne, un avocat, d’allégeance conservatrice, qui a été président de la Société Saint-Jean-Baptiste, a remplacé le maire élu en 1908, puis en 1924. Il a aussi représenté la circonscription d’Ottawa-Est à l’Assemblée législative de l’Ontario de 1911 à 1914, où on lui doit des prises de position musclées en faveur de la francophonie.

Eddy A. Bourque est élu maire en 1949, après avoir été commissaire pendant 12 ans. Il arrive en poste à une époque charnière pour la ville d’Ottawa, qui entre alors dans une période de développement important. Et c’est donc, contrairement à ses prédécesseurs, moins pour ses engagements patriotiques qu’on se rappellera de lui que comme politicien actif sur la scène municipale. Il aura, entre autres, à conjuguer avec les volontés du gouvernement fédéral de créer littéralement une « capitale nationale » dans ce qui n’avait été jusque-là qu’une petite ville de fonctionnaires, gérée par ses élites commerciales et professionnelles.

Pierre Benoit, un avocat, à la tête de la ville d’Ottawa de 1972 à 1974, évoluera dans ce nouveau contexte. Il a été aux premières loges des négociations entreprises par la Ville avec les représentants des résidents de la Basse-ville au lendemain de la destruction de leur quartier, lors de la vaste entreprise de rénovation urbaine des années 1960. Pierre Benoit a supervisé la mise en œuvre de la première politique de bilinguisme de la Ville, adoptée en 1970. Depuis Pierre Benoit, aucun francophone n’a été élu comme premier magistrat d’Ottawa.