Capsule

La trajectoire de Benjamin Sulte

Dans la capitale naissante, rares sont les gens de lettres qui font de l’écriture leur gagne-pain. Les écrivains qui marquent la scène littéraire d’Ottawa jusqu’au début du xxe siècle sont presque tous fonctionnaires. Ils suivent à peu près tous la même trajectoire : du collège classique au droit ou au journalisme, ils ont épousé une carrière dans la fonction publique, quand ils n’ont pas fait le saut en politique. Ils ont fondé des sociétés culturelles, qui leur ont servi de tribune. Le parcours de Benjamin Sulte, écrivain parmi les plus actifs sur la scène littéraire de la capitale au tournant du xxe siècle, est à cet égard exemplaire.

Sulte arrive dans la capitale en 1866 comme rédacteur du journal Le Canada.  Il entame l’année suivante une carrière de traducteur à la Chambre des communes. En 1870, il entre au département de la Milice et de la Défense, comme chargé de la correspondance. Il sera promu commis en chef en 1889, poste qu’il occupera jusqu’à sa retraite en 1903. Sulte est le premier Canadien français à avoir publié un recueil de poésie en Ontario. Il publie aussi des contes, des monographies et des biographies. Il collabore à plusieurs journaux et revues, notamment La Sentinelle, La Minerve, La Revue canadienne, dont il est membre fondateur. Mais c’est son Histoire des Canadiens français, publiée en huit volumes, de 1882 à 1885, qui constitue son œuvre marquante. Écrivain prolifique, il a signé des milliers d’articles au cours de sa vie, plus de 3500, estimait-il lui-même en 1916. Plusieurs de ces textes sont réunis dans les 21 volumes des Mélanges historiques,  publiés entre 1918 et 1934. 

Sulte sera président de l’Institut canadien-français d’Ottawa de 1874 à 1876, puis en 1900-1901. Membre fondateur de la Société royale du Canada en 1882, il deviendra le président de la section française en 1885, et le président général en 1904-1905.  La même année, il siégera au bureau de direction du Canadian Club of Ottawa. Sulte sera parmi les membres fondateurs de la Société des Dix – on parlera aussi du « Club » ou du « Cercle » des Dix – qui réunit des littéraires et autres intellectuels d’Ottawa à partir de 1884.

De 1887 à 1923, Sulte habite le 304, rue Wilbrod, à l’angle de la rue Friel, demeure qu’il nomme « Château-Bonheur ». Il meurt à Ottawa, le 6 août 1923, à l’âge de 81 ans.